Québec, le 13 juin 2024 – À l’approche du 1er juillet, le Comité logement d’aide de Québec Ouest (CLAQO) lance aujourd’hui son Rapport sur la situation des locataires de Sainte-Foy intitulé « Propriétaires abuseurs : locataires dans la peur ». Le rapport dévoile que non seulement la crise ne touche pas uniquement les locataires des quartiers centraux et que les besoins sont grands dans l’ancienne banlieue de Québec, mais que les locataires connaissent les solutions aux crises du logement : une meilleure protection des droits des locataires et le développement du logement social.
La fin de mois difficile pour bien des locataires
Un locataire témoigne : « Sainte-Foy vit particulièrement un problème de loyers beaucoup trop dispendieux pour la qualité offerte. Des investisseurs abusent des locataires pour s’enrichir… ».
L’organisme rappelle que selon les données de la Société canadienne d’hypothèque et de logement, entre 2022 et 2023, le loyer moyen a augmenté de 5,1% à Sainte-Foy et Sillery, alors qu’il avait déjà augmenté de 7,2% l’année précédente! Le CLAQO estime qu’au dernier recensement 5230 ménages locataires de Sainte-Foy et Sillery consacraient plus de 30% de leur revenu pour se loger.
« Ce qui est fou, c’est que la situation a complètement dégénéré depuis 2021, s’exclame Felix Marois, organisateur communautaire du CLAQO. 54% des répondant·e·s à notre sondage ont révélé consacrer plus de 30% de leur revenu pour se loger! Pire encore, près d’une personne sur quatre a déjà dû repousser un paiement essentiel afin de payer son loyer. Ces locataires sont confrontés à un choix impossible : manger ou risquer d’être expulsé pour non-paiement de loyer ».
Une course à obstacles pour les locataires issu·e·s de l’immigration
L’organisme de défense des droits rappelle que c’est dans l’arrondissement de Sainte-Foy—Sillery—Cap-Rouge qu’on retrouve la plus grande concentration de locataires issue de l’immigration à Québec. Il rappelle aussi que ce sont des locataires qui, même s’ils ont parfois un bon revenu, ont de la difficulté à accéder à la propriété et leur absence de dossier de crédit rend souvent difficile la recherche de logement locatif.
Le rapport confirme à quel point cela peut être dur pour les locataires immigrant·e·s de trouver un logement. 36% des ménages issus de l’immigration y ont affirmé avoir un logement qui ne répond que peu ou pas à leurs besoins. De plus, 32% de ces mêmes ménages disent avoir été victime de discrimination.
Selon Félix Marois « Il est trop facile pour les propriétaires actuellement de discriminer impunément les candidat·e·s à la location. Pour que la règle de la “première arrivée, première servie” soit respectée, il faudrait qu’au moins le Tribunal administratif logement soit compétent pour entendre les cas en discrimination ».
Les locataires ainé·e·s laissés pour compte
Le CLAQO rappelle qu’à Sainte-Foy plus de 1 locataire sur 4 (26,2%) est une personne de 65 ans ou plus, alors que 13,6% des locataires y ont 75 ans ou plus. Or, 41,5% des locataires de 65 ans et plus consacrent plus de 30% de leur revenu à leur logement. Cette proportion grimpe à un presque incroyable 51,6% des locataires de plus de 75 ans.
Un locataire qui a participé à l’enquête explique : « Pas simple, il n’y a pas de logement. Nous sommes tous pris en otages en quelque sorte. De plus, je serai bientôt âgé et le prix des résidences est incroyablement élevé…»
Félix Marois ajoute : « Au total, c’est 55% des locataires sondé·e·s qui se disent inquiets ou inquiètes face à la fermeture de RPA dans l’arrondissement. Si on ne peut plus faire confiance au marché privé pour répondre aux besoins d’une population toujours grandissante de personnes âgées, il est peut-être temps de repenser les fondements de comment loger les ainé·e·s dans notre société. »
Les locataires dans la peur, mais conscient·e·s des solutions
Pour l’organisme communautaire, c’est clair que les propriétaires profitent de la crise du logement pour s’en mettre plein les poches, aux dépens des locataires. « Les locataires, dépendant des propriétaires pour combler un besoin de base, sont laissés dans la peur de se retrouver à la rue. 88% des répondant·e·s se disent inquiets ou inquiètes face à la situation actuelle. Pourtant, les autorités tardent à agir » s’exclame-t-il.
Le rapport dévoile finalement que, malgré tout, les locataires connaissent bien la solution à la crise du logement. 79% des locataires sondé·e·s sont en faveur de la construction de logements sociaux dans Sainte-Foy et 65% de celleux-ci sont en faveur d’un gel ou d’un contrôle universel et obligatoire des loyers.
Félix Marois conclut : « Les solutions aux crises du logement, nous les martelons depuis longtemps. Le rapport prouve que nous ne sommes pas seuls, mais que la grande majorité des gens qui vivent la crise à Sainte-Foy ont la même opinion. La crise n’est pas près de se terminer si les autorités ne sont pas plus ambitieuses dans leurs actions. Ça prend un gel des loyers et un chantier massif de développement de logements sociaux ».
La crise du logement tel qu’elle est vécue par les locataires
« La mairesse Boucher affirmait, il n’y a pas si longtemps, en parlant du logement social qu’« il ne faut pas regrouper les familles dans les ghettos » se remémore l’organisateur communautaire. « Dans l’imaginaire populaire longtemps véhiculé par des personnages comme Mme Boucher, Sainte-Foy (et maintenant l’arrondissement de Sainte-Foy—Sillery—Cap-Rouge) était un endroit où on ne trouvait pas de pauvreté et, par extension, de locataires. Or, c’est faux et ça a toujours été faux », rajoute-t-il.
Pour le CLAQO, cette enquête avait le double objectif de documenter les réalités vécues par les locataires et de les amener à réfléchir à leur situation. Elle a pris la forme d’une distribution de sondages* dans différents milieux de l’arrondissement, puis d’un Forum populaire, où une quarantaine de personnes se sont présentées, ont réagi à une présentation des données préliminaires du sondage et ont discuté de leurs expériences. Elle a été complémentée par une analyse de données tirées du plus récent recensement.
« Nous sommes très contents de l’enquête, affirme Félix Marois. Non seulement il y a eu beaucoup de réponses au sondage mais, en plus, l’enquête a déjà fait pas mal jaser dans Sainte-Foy. Pour beaucoup de locataires, ça leur a permis de prendre conscience de leur situation et de se mobiliser pour la transformer ».
*Au total, le sondage a obtenu 275 réponses, ce qui correspond à environ 1,8% des ménages locataires de Sainte-Foy et Sillery.